Comprendre et manager la génération Y

Les moins de 30 ans appréhendent l’entreprise de façon bien particulière. Recrutement, implication, fidélisation, communication… Les conseils pour comprendre leurs comportements et savoir les piloter.

En France, la génération Y est un groupe de 13 millions de personnes. Nées entre 1978 et 1994, elles représentent 20 % de la population française et sont plus nombreuses que les membres de la génération précédente, la « génération X ». Si cette génération est définie par une empreinte démographique sur la pyramide des âges, elle s’en est affranchie pour devenir une véritable culture dont l’état d’esprit se partage avec les membres des autres générations.

Face à l’arrivée de cette génération dans les entreprises, les dirigeants et managers des générations précédentes se grattent la tête avec consternation. Les exemples sont légion : le chef d’entreprise déstabilisé devant le changement de rôle qui l’oblige, lui, à gagner le respect de ses jeunes salariés, le manager désemparé de voir une équipe complète démissionner pour suivre l’un des leurs dans une autre entreprise… Les exemples sont nombreux.

La génération du changement

Cette génération cherche à montrer sa différence et ce qui était acquis (respect, prime à la performance, patience de prouver sa valeur avant d’évoluer, etc.) ne l’est plus. Ceux que l’on dit appartenir à cette génération sont à l’aise dans le changement comme des poissons dans l’eau. Ils créent le changement, passant d’une marque ou d’un emploi à l’autre. Ils s’épanouissent dans l’ambiguïté et l’incertitude, des environnements où beaucoup de baby-boomers ne sont, eux, pas du tout à l’aise. Il s’agit bien sûr d’un apanage de la jeunesse mais la génération Y aspire à changer le monde comme leurs parents l’on fait. Sauf que cette fois-ci, ils espèrent ne pas rentrer dans le rang.

Cette génération est après tout issue de son environnement : parents absents remplaçant l’affection par ce que l’on peut offrir de meilleur, notamment les technologies nomades. Jeux vidéo à partir de 4 ans, Skyblog à partir de 8 ans et téléphone mobile à 10 ! Nous ne parlons plus d’informatique mais de monde digital dans lequel tout va très vite. Je crée un blog selon mon humeur du moment et j’utilise Internet non pas comme un outil d’information mais un moyen d’expression, de rencontre, de création et d’évasion.

En entreprise, un comportement inédit

Et de même que la « gen Y » ne compte pas voir sa créativité asséchée par le formatage du parcours scolaire, elle ne compte pas non plus subir l’autorité d’un patron. Elle exige de travailler AVEC et jamais POUR quelqu’un. La guerre des talents a commencé et elle sait qu’il est tout à fait possible de réussir sans avoir de bonnes notes à l’école. Ses modèles sont Kamini ou Steve et Chad, les fondateurs de YouTube, des personnes qui ont prouvé une fois pour toutes que le succès était dans l’originalité et pas dans le bulletin de notes…

La prise de conscience à cette évolution des mœurs a été longue en France mais le sujet commence à rencontrer son public parmi les dirigeants et managers. Les pays anglophones ont déjà toutes sortes d’études sur le sujet. Vous trouvez ces jeunes salariés arrogants et instables ? Imaginez travailler dans un pays où le taux de chômage est autour de 4 % et dans lequel il est possible de changer d’emploi en quelques semaines ! Les mots « fidélisation », « bien-être » et « écoute » prennent alors tout leur sens. Et si vous persistez à penser que c’est de l’énergie perdue que de devoir s’adapter à ces jeunes salariés au cas par cas, réfléchissez un moment. Qui est en première ligne face à vos clients ? Qui pourra remplacer votre collaborateur promu pour prendre le poste de celui qui vient de partir à la retraite ? Oui, sans nul doute un membre de la génération Y.

Alors c’est perdu d’avance ? Sommes-nous condamnés à les voir rester dans notre entreprise uniquement pour des gratifications de court terme avant de passer à autre chose, sans jamais s’engager réellement ? Non : tout est possible, mais c’est à vous de vous rendre sur leur terrain. Ils ne viendront pas sur le vôtre. Surtout si vous êtes de la génération des baby-boomers qu’ils estiment responsable de l’état de la planète, du changement du climat et de la situation économique de la France.

Très concrètement, comment les manager ?

Voici quelques méthodes concrètes que vous pouvez mettre en place… sans attendre :

»  Recrutez sans le CV. Nous entrons dans l’air de la motivation et des valeurs. Il s’agit de recruter celui qui veut, plus celui qui peut.
»  Soyez créatif dans vos méthodes de management, communication et évaluation.
»  Assurez la transparence de vos procédures de recrutement et d’évaluation de la performance.
»  Proposez une formation d’intégration mettant en scène la société pour rassurer les jeunes salariés sur le fait que la toute puissante entreprise ne va pas les manger et le patron s’enrichir sur leur dos.
»  Communiquez votre feedback en flux RSS. Immédiatement, pas dans 3 mois.
»  Proposez une expérience de vie et pas seulement un emploi !
»  Proposez des primes de cooptation alléchantes pour rassembler la tribu de vos salariés.
»  Donnez de réelles responsabilités : « Je veux Z, bonne chance ! » et pas « Si tu sais faire A correctement, je te donnerai B à faire, puis C, puis… »
»  Ecoutez les idées. Plus que jamais l’expérience n’attend pas le nombre des années.
»  Tous patrons. Organiser des équipes projet avec des responsabilités tournantes.
»  Faites confiance. Donner le but et le délai, pas une montre.
»  Parlez court terme et prime immédiate. L’avenir ? C’est dépassé.

En aucun cas je n’encourage à attirer, recruter, diriger ou motiver les salariés selon leur âge. Diviser la population en générations revient à étudier la diversité selon un angle particulier mais ce n’est pas le seul. Il ne s’agit surtout pas de minimiser l’importance de tous les autres éléments qui font qu’un homme est un homme tels que personnalité, valeurs, culture, centres d’intérêt, religion, structure familiale, provenance géographique, appartenance ethnique, handicap, etc. Je m’arrête ici pour ne pas franchir la limite entre « diversité » et « complexité ».