Discours d’introduction de la soirée “Génération Y et économie sociale et solidaire” :
Bonjour, et bienvenue à cette première soirée de partage et d’échange en partenariat avec Danone Communities. Tout d’abord merci à Benjamin Cavalli, chef de projet Entreprenariat social pour la Croix Rouge Française qui nous reçoit ce soir.
Je m’appelle aussi Benjamin. Si je suis parmi les premiers à avoir parlé de Génération Y, mon rôle n’est pourtant pas tant de parler des “Y” que de changer les modes de pensées et le monde de l’entreprise. Ce qui devient plus facile car depuis peu, lorsque je commence une phrase par “Génération Y a dit…”, on me prête plus facilement l’oreille.
Mais attention, réduire la Génération Y uniquement à des “jeunes” dont le comportement se résume à cette jeunesse et penser que “ça leur passera” dès qu’ils auront un appartement à payer et des enfants à élever serait se tromper aussi lourdement que de penser :
– que nous allons sortir de cette récession pour revenir aux affaires comme avant,
– que Internet est un outil que l’on débranche au gré de ses besoins,
– que les “nouveaux” comportements ne concernent que les diplômés,
– que l’entrepreneuriat social et le solidaire
n’est qu’une passade de personnes pensant qu’elles peuvent changer les choses.
La génération Y est d’abord une culture liée à son passé (et donc à ses parents) et arrivant dans l’entreprise au moment où notre civilisation est à la croisée des chemins : la prise de conscience que notre monde est malade, que “l’autre” est différent, que la crise n’est pas que économique, et que les technologies deviennent “sociales” ont des conséquences inattendues dans l’éducation, l’apprentissage, les comportements, les institutions, la hiérarchie des âges, etc. etc.
Et il va falloir passer le mot ! Le monde pré-Google est en train de disparaître, les réponses de nos parents ne sont plus nos réponses, nos réponses de ce matin, ne sont peut être plus nos réponses de ce soir. Éducation, management, carrière, sens, ce n’est plus l’heure du copier-coller et des réponses toutes faites ! A l’exemple de cette soirée que nous allons passer ensemble, vous allez devoir participer et construire un nouveau modèle, crédible, durable et humain ! Pas adhérer mais co-créer !
Se rencontrer ce soir pour parler de génération Y, d’engagement social et solidaire et savoir s’il est possible de gagner sa vie en changeant les choses tout en assurant un réel équilibre vie privée / vie professionnelle ne pouvait se faire qu’aujourd’hui. Après l’émancipation de nos parents et la recherche du confort de nos frères et soeurs, nous sommes entré dans l’ère de l’épanouissement personnel construit sur la libre expression de nos émotions, l’affirmation de notre différence, la quête de sens, l’équilibre entre raison et émotions et le respect de l’autre.
Cette mutation ne concerne donc pas “que” les Y, elle nous concerne tous ! Ce n’est pas un autre paragraphe qui commence mais bien un nouveau chapitre!
• Un nouveau chapitre où les plus jeunes peuvent apprendre aux plus anciens,
• Un nouveau chapitre où les plus jeunes savent qu’ils suivent d’autres générations avec lesquelles ils peuvent compter,
• Un nouveau chapitre où on un avenir excitant nous attend toujours après 50 ans,
• Un nouveau chapitre ou virtuellement toute personne ayant accès à internet peut partager avec nous sa vie, ses rêves et ses espoirs,
• Un nouveau chapitre où le management ne peut plus s’exercer sur la manipulation,
• Un nouveau chapitre dans lequel le sens vaut rémunération,
• Un nouveau chapitre dans lequel concilier vie pro et vie perso n’est plus un objectif mais un postulat de départ !
La question de ce soir n’est donc pas de savoir quelles sont les spécificités de notre génération ni de savoir si nous sommes plus conscients de l’environnement, plus connectés ou plus intelligents que les autres générations.
Parce que ça, tout le monde sait déjà que nous le sommes !
L’enjeu de ce soir est d’échanger sur les nouvelles voies que nous pourrions suivre ensemble pour, en même temps, prendre en charge nos responsabilités par rapport à la planète et aux hommes et femmes qui y vivent tout en répondant à notre quête individuelle de sens et réussir le développement durable de notre avenir collectif.
Alors, comment pensez-vous gagner votre vie dans le respect de l’autre et de la planète ?
Une prochaine soirée sera organisée prochainement. Plus d’information sur la soirée de mardi ici.
Merci Benjamin pour la brillante animation de cette soirée, qui a fortement contribué à ce que nous passions tous un excellent moment.
De mon point de vue, la génération Y se trouve essentiellement parmi une population de jeunes très diplômés et ayant voyagé, mais je m’identifie totalement au portrait fait de cette génération.
Mes propres impressions sur cette soirée:
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Merci pour ce retour.
Effectivement, lorsque j’ai commencé à approcher ce sujet, je voyais aussi la Génération Y comme une génération de “riches” qui pouvaient se permettre de voyager, parler plusieurs langues et posséder le bon diplôme.
Et je pense que si c’était la règle il y a 5 ans ce n’est plus le cas aujourd’hui.
Ce qui explique pourquoi je suis régulièrement invité à intervenir en chambres des métiers, en CFA ou dans l’industrie (Plasturgie, IUMM, etc.) à travers toute la France pour parler de cette culture qui a dépassé les frontières des grandes écoles.
Les nouveaux comportements ne sont plus seulement liés au diplôme, mais au mode d’éducation, au secteur économique (on cherche autant de chauffagistes que d’ingénieurs en télécom) et à l’utilisation des “technologies” (au dernier décompte le taux de pénétration d’internet en France frôlait les 80%).
Bonjour Monsieur,
Je m’appelle Emmanuel et suis le père d’un garçon de tout juste 18 ans. Sur mes conseils, il a donc participé à la réunion que vous avez organisée récemment accompagné de l’un de ses amis. Lui est en 2nde année professionnelle de vente action marchande. Son ami en terminale SGT. Tous 2 sont à un moment de questionnements sur leur vie personnelle et professionnelle et leurs choix d’orientation.
Ils sont porteurs et représentatifs aussi de cette génération (et des autres) lucide sur les impasses de notre société et de notre monde et des enjeux individuels et collectifs, en quête de sens et de conciliation entre leurs valeurs et leur vie professionnelle et espéraient obtenir de judicieux conseils sur l’entreprenariat social. Ils n’ont pas regretté leur participation car les témoignages et les rencontres étaient, selon eux, intéressants. En revanche, lorsque je les ai questionné sur ce qu’ils en retenaient pour eux, mon fils m’a fourni une synthèse quelque peu brutale que je vous livre verbatim : “Les idées sont très intéressantes et j’adhère, mais, pour mon orientation, çà ne vas pas car je n’ai pas envie de crever de faim”.
J’ai donc essayé d’en savoir plus pour comprendre comment il en arrivait à cette conclusion. Il m’a fait ainsi part de plusieurs éléments:
1. “On était les seuls lycéens. La plupart des autres étaient des étudiants de grandes écoles comme HEC ou Sciences Po”. Génération “Y” ou “HS” (Hec-Sciences Po)?
2. Une des animatrices a raconté son parcours dont il a retenu qu’après un travail dans le design de produits de luxe, elle a eu conscience qu’elle ne pouvait pas envisager de se retrouver à 40 ans dans sa Mercedes et s’ennuyer. Que dans son couple c’est son mari qui porte le costard et qu’elle a les moyens mais cherche à donner du sens à sa vie. Respectable question existentielle mais dont le contenu doit faire écho à bien peu à l’heure où le dernier rapport de l’Observatoire sur la pauvreté et l’exclusion sociale souligne, notamment, que 8 millions de personnes vivent avec moins de 908 euros, que la précarité et l’exclusion augmentent dangereusement.
3. Une autre aurait énoncé que leur génération, “Y” donc, devait corriger les erreurs de la génération précédente “X” qui a laissé le monde et la société dans l’état où il se trouve aujourd’hui. Mon fils ne comprenait pas pourquoi on opposait ainsi les jeunes et les vieux.
4. Que “c’est décourageant car les métiers de la solidarité et l’entreprenariat social supposait de renoncer à bien gagner sa vie.”
J’ai donc du recadrer le sujet et démonter ces « arguments » pour leur donner envie de poursuivre leurs explorations sur le sujet.
Je tenais à vous faire part de ce témoignage qui me parait en totale contradiction avec le concept que vous défendez au demeurant louable et intéressant. Je ne sais pas ce que vous en ferez. J’ose espérer que votre mouvement ne se réduit pas à cette absence de diversité et à cette caricature de pensées et de certitudes qui me semble bien loin de la réalité d’une bonne partie de la jeunesse d’aujourd’hui.
Pour apporter un peu de complexité au débat je reprendrai Edgard Morin (in Planète en danger – Le Nouvel Observateur 1990) de la génération…”Z” ?
“Il nous faut abandonner aussi l’idée encore répandue que nous avons trouvé la formule de la bonne société et du vrai développement, que nos sciences de l’homme et de la nature sont quasi achevées et que nous avons atteint la véritable conscience. Au contraire les pseudo solutions dites soviétiques nous ont fait régresser, nous allons comprendre bientôt que le système triomphant de l’Ouest va révéler ses carences, que ces solutions vont poser des problèmes plus graves que ceux que nous avons résolu, que nous allons arriver à une crise ou à une impasse civilisationnelle. Nous allons de plus en plus comprendre que non seulement les recettes du développement du tiers-monde mais aussi que notre développement matériel, technique, économique produisent un sous-développement mental, psychologique, moral. Nous allons comprendre que c’est notre conception du développement qui est sous-développée… alors il nous faut bien considérer que nous sommes encore en la préhistoire de l’esprit humain et toujours en l’âge de fer planétaire. Nous sommes à une ère agonique de mort et de naissances. La Terre-patrie est en danger. Nous sommes en danger, et l’ennemi, nous pouvons enfin le comprendre aujourd’hui, n’est autre que nous-mêmes.”.
Dans cet esprit, je vous prie de vouloir bien recevoir, Monsieur, l’expression de mes salutations distinguées.
Emmanuel.
PS. Au moment où je vous écris, j’apprend que mon fils a bénéficié d’un « suivi » post réunion par courriel avec une demande de don…
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Merci pour votre commentaire. J’y lis bien sur quelques reproches, a posteriori, d’une personne qui n’a pas pu venir, partageant les propos d’une personne qui n’a préféré ne pas participer aux discussions in situ. Il y a des raisons à cela. Nous avons décidé d’organiser cette soirée pour précisément mieux se comprendre (soi-même et avec les autres) : c’est une occasion ratée, dommage. Heureusement, ce blog est là pour nourrir les conversations : alors continuons.
Je lis votre commentaire avec intérêt et j’espère que nous pourrons continuer, au-delà de la critique, sur des bases constructives pour améliorer le concept de la soirée qui a vraiment pour but d’aider les membres de la génération Y à mieux appréhender des fréquentes tensions entre leurs aspirations pro et sociétales (j’ai d’ailleurs eu cette réaction d’une personne dans la salle me confiant : « Ca m’a fait du bien de savoir que je n’étais pas la seule à me poser ces questions ». Dommage que vous n’ayez pas été là en personne pour ressentir la dynamique : vos arguments sont pleins de bon sens mais malheureusement, puisqu’il est toujours questions de perception, vous auriez pu ainsi vous bâtir votre opinion par vous-même.
Pour rentrer dans le concret : non, nous ne mettons pas face à face les générations. Surtout que comme il a été dit, les Business Angels derrière plusieurs des initiatives présentées ce soir appartiennent à la génération X et au-delà. Le dialogue entre les générations est un moteur évident. C’est pour lancer le débat qu’une question a été posée au témoin pour savoir ce qu’ils faisaient pour réparer le monde qui nous sera légué. La question peut choqué, mais les défis du millénaire nous le rappellent tous les jours. http://www.un.org/french/millenniumgoals/
Oui, il y avait des diplômés. Le panel s’est construit progressivement et on m’a demandé de l’animer. Je n’ai pas demandé s’il était représentatif de la population française. C’était une bande de jeunes actifs qui, à leurs niveaux, avaient fait des choix pro pour des objectifs sociaux. J’ai trouvé cela intéressant pour un début et me suis posé la question de savoir pourquoi certaines de ces personnes diplômées sont retournées vivre chez leurs parents pour se battre pour leurs idées en lieu et place d’un parcours déjà tout tracé dans une grande entreprise ? La dynamique n’était pas d’exclure par des exemples caricaturaux… juste de partager des itinéraires de vie. Pour les prochaines éditions, nous ferons en sorte de davantage diversifier les exemples. Toutes les propositions sont bienvenues.
Ce qui m’amène à votre remarque sur la difficulté de gagner décemment sa vie en étant entrepreneur social ou solidaire. C’est exactement le contraire de ce que plusieurs de nos témoins nous ont expliqués. Après quelques mois de vaches maigre – le lot de beaucoup d’entrepreneurs – ils commencent à pouvoir se rémunérer.
Je suis sûr que votre fils aurait donné davantage de perspectives à ses questions, très légitimes, s’il avait posé des questions lors de la première partie de soirée, d’autant plus que qu’une personne de l’assistance, en recherche d’emploi depuis plusieurs mois, a partagé votre point vue. En participant à la seconde partie de soirée et les Speed Meeting, il aurait peut être aussi pu étoffer son réseau, ce qui lui aurait été bénéfique pour la suite et l’aurait rendu plus acteur que spectateur.
Au final, faut-il conclure que tout est un éternel recommencement ? Il semble en tout cas que les 80 personnes présentes avaient, en majorité, envie de ne vouloir citer personne et d’écrire leurs propres citations avec les mots à eux.
Le dialogue entre un père et un fils est essentiel. J’espère que vous viendrez à deux à la prochaine édition ?
Merci pour ce retour.
Effectivement, lorsque j’ai commencé à approcher ce sujet, je voyais aussi la Génération Y comme une génération de “riches” qui pouvaient se permettre de voyager, parler plusieurs langues et posséder le bon diplôme.
Et je pense que si c’était la règle il y a 5 ans ce n’est plus le cas aujourd’hui.
Ce qui explique pourquoi je suis régulièrement invité à intervenir en chambres des métiers, en CFA ou dans l’industrie (Plasturgie, IUMM, etc.) à travers toute la France pour parler de cette culture qui a dépassé les frontières des grandes écoles.
Les nouveaux comportements ne sont plus seulement lié au diplôme, mais au mode d’éducation, au secteur économique (on cherche autant de chauffagistes que d’ingénieurs en télécom) et à l’utilisation des “technologies” (au dernier décompte le taux de pénétration d’internet en France frôlait les 80%).