Depuis quelques mois vous devez avoir vu passer beaucoup d’articles sur cette fameuse génération Y et vous avez l’impression d’en avoir fait le tour. Pourtant, passer des discours aux actes n’est pas simple et demande d’aller au-delà de l’effet de mode (Y, 2.0…) pour se poser les vraies questions ! Quel est le lien entre la culture Y et notre culture d’entreprise ? Quelles innovations devons-nous mettre en place ? Existe-t-il des solutions déjà toutes prêtes ou devons-nous trouvez les nôtres ?
C’est ce que n’ont pas forcément compris les consultants qui depuis peu cherchent à se diversifier (c’est la crise). Ils se jettent à corps perdu sur ce nouveau “créneau” en proposant des audits en 5 étapes et des formations finement marketées sur le sujet. Ils sont accompagnés par les nombreux blogs sur “Y et marketing”, “Y et management”, “Y et formation”, “Y et recrutement” etc… qui sont mis en ligne presque quotidiennement.
Il est temps de faire le point. Je m’adresse ici aux recruteurs, responsables RH et dirigeants qui écoutent ces consultants qui en sont encore à présenter à leurs clients des listes avec “bullet points” différenciant les générations : les “‘Vet” traditionalistes, les Baby “boom” boomers, les “X” loosers et la “Y” digitale sans être entré en entreprise et compris que cette classification n’est que le petit bout de la lorgnette que l’on appelle diversité.
Ces consultants, venus de nulle part et ayant pour seule crédibilité d’avoir un consultant de 25 ans dans leur rang, oublient que finalement nous pouvons tous être des “Y” et que les comportements “Y” ne sont que des symptômes. Non, l’Ipod ne suffit pas à illustrer la Génération Y tout comme Tintin ne suffit pas pour les Baby-Boomers !
Des Y de tous les âges !
Quelques éclaircissements d’abord concernant les dates de 78/94 délimitant au jour près qui est Y et qui ne l’est pas, comme la frontière qui a arrêté le nuage radioactif de Tchernobil en 86 (nuage qui faisait partie de la génération Y donc). Bien sûr, cette barrière démographique n’est pas étanche ! Pourquoi voulez-vous mélanger des pommes de terre avec des pinces à linge, des dates avec des comportements ?
Comme les travaux menés avec Jocelyn Remy dans de grands groupes internationaux nous l’ont montré, cette génération se définit d’abord par des comportements, des valeurs et une culture commune. Afin d’être pédagogique, nous réduisons volontairement ces valeurs aux 4 “i” : l’individualisme (créateur de relation), l’interconnexion (stimulateur d’émotions), l’impatience (développeur de connaissance) et l’inventivité (valorisant la différence et pas seulement l’excellence).
Donc, quel que soit votre âge, ce sont vos comportements qui déterminent si vous êtes un Y. Et ces comportements ne sont pas seulement déterminés par l’utilisation d’Internet : en France, il y a toujours 9 millions de personnes qui n’ont jamais envoyé de mail… Vous avez un problème avec l’autorité “autoritaire”, vous souhaitez comprendre les raisons pour lesquelles vous devez faire telle ou telle tâche, vous considérez que vos collègues de travail peuvent vous aider à régler un problème personnel… Hum, vous n’êtes pas un peu “Y”, vous ?
Génération Y : plus que des comportements différents, une mutation
Il faut comprendre que les comportements qui étonnent et qui servent d’exemples aux dirigeants que nous recevons en séminaire sont souvent des cas extrêmes : ceux qui démissionnent d’un emploi sur le champ, ceux qui jouent la concurrence avec leur employeur, ceux qui partagent leur peine de coeur avec leur manager… Si certains voyaient la crise comme le meilleur moyen de voir ces comportements disparaître avec des candidats redevenus dociles, ils s’aperçoivent aujourd’hui que cela ne dépend pas de l’âge mais du secteur professionnel. Le mouvement de balancier entre offre d’emploi et demande(ur) d’emploi n’a pas touché tout le monde.
Dépasser le constat pour comprendre causes et conséquences
Ainsi, la culture Y (les “4i” définis plus haut) restent bien présente, crise ou pas. Ce sont les symptômes d’une évolution de la société (famille, éducation), des outils (collaboration, échange) et des pratiques (innovation, relations, repères managériaux) voire du manque de pratique (l’intégration est encore trop souvent mal préparée).
Cette culture aura un impact réel sur le fonctionnement et l’organisation des entreprises, sur les pratiques de management et de gestion des talents (attirer, recruter et fidéliser), et enfin sur les modes de transmissions du savoir et de formation. Pendant que certains consultants présentent leur matrice de comportement par génération tiré d’un livre, il est temps de participer aux réflexions du CJD, de l’APM et de tant d’autres qui travaillent sur l’innovation en ressources humaines et sur les nouvelles pratiques de management que “la culture Y” réclame depuis… 15 ans ! Il est temps de trouver de nouveaux chemins et de les explorer, de s’ouvrir au lieu de se refermer sur soi, de parier sur la vitalité et l’intelligence collective plutôt que de faire le dos rond, d’arrêter d’appliquer les mêmes solutions “relookées Y” à des problèmes qui ont changé de nature.
Essayons l’attractivité par “bouche à oreille”, le recrutement “par l’équipe” ou l’intégration “story-telling” parmi d’autres. Mais surtout, surtout, cessons 2 minutes de stigmatiser ce qui différencie les générations ! Identifions plutôt comment et sur quoi les rapprocher, trouvons ce qui les rendra mieux à même de collaborer, pas seulement pour vivre mieux ensemble (ça compte mais ça coûte) mais aussi pour être plus efficaces durablement.
Rétroliens/Pings